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 Scéance Ema _ [No Reply]

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Ema De Beauvoir
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Ema De Beauvoir


Messages : 228
Date d'inscription : 06/08/2009
Âge : Prout _

Scéance Ema _ [No Reply] Empty
MessageSujet: Scéance Ema _ [No Reply]   Scéance Ema _ [No Reply] EmptySam 29 Aoû - 15:04

J’avais reçu cette convocation le matin même. Une feuille délicate, sur laquelle brillait une écriture souple et lisse. Mes yeux se noyaient dans le trait sombre de l’encre et je baignais dans une mer de larmes. Les boucles m’étouffaient et je tombais en elles comme je sombrai dans le sommeil. Je n’avais aucune idée de ce que la convocation voulait dire. Était-elle écrite en Anglais, en Allemand, en Français ou en Japonais ? Je n’en savais plus grand-chose. Je n’avais retenu d’elle que la date et l’heure. Quelques chiffres, quelques lettres. Pas plus. J’étais terrifiée à l’idée de savoir pourquoi j’étais venue au Japon. Terrifiée à l’idée de me savoir entre les mains d’une énorme machine. Et pourtant, j’étais rassurée. Cette séance, j’en étais persuadée, me permettrait de rentrer en France. Je n’aurai plus peur. Plus de ça. Plus.
Je n’avais rien compris. Ou plutôt, je ne savais rien. J’étais allée au Japon dans l’espoir de retrouver mon esprit, aussi propre qu’avant. Mais on ne fait pas profiter les mauvais enfants des bonnes choses. Mon caprice m’avait rendue mauvaise. Dieu lui-même ne pouvait plus rien contre moi. J’avais été prise par le diable, et maintenant, je n’étais plus humaine. Je m’étais souvent demandé pourquoi c’est moi que le diable avait choisi. Et pourquoi il n’avait pas préféré Alice. Je ne savais pas répondre. Et mon esprit avait beau se torturer, je ne parvenais pas à comprendre que j’étais maudite. Je n’arrivais pas à quitter la petite fille noble de province. Il m’était impossible de laisser partir Ema, celle encore innocente et pure. Mais peu importe.

Mes pas ont résonné dans le couloir. J’étais tendue. Et lorsque ma main se porta à la poignée de la porte de chambre, j’ai eu peur. Tellement peur que j’ai hésité, longtemps. Je n’avais pas de souvenirs, pas d’objets pour me rassurer. Je ne voulais rien de tout ça. Pourtant, j’étais sûre que j’irai mieux. Ca me paraissait évident que ce cirque allait me soigner de tous mes maux, qu’il allait m’exorciser du diable. Alice allait être vaincue par une machine. J’allais pouvoir dormir.
La pièce était vide. Vide de sens et vide d’air. Je venais y troubler le silence mortel. Les murs blanc et immaculés me fixaient, et sur eux planait mon ombre. Elle était faible, tremblante et mal à l’aise. Je venais en ces lieux pour troubler ces murs blancs, et troubler mon ombre. Et pour troubler ma mémoire. De toute évidence, c’était moi plus que les murs que je devais secouer. Se ressaisir, remonter et respirer, enfin. Redevenir humaine et tirer hors de mon corps l’immondice que j’abritais. Pourtant, j’étais morte de peur, dans cette pièce blanche. Et ce qui me terrifiait le plus, c’était ce lit.

Posé au milieu de la salle, il attirait de manière évidente mon regard. J’avais beau essayer de fixer mon ombre, j’en revenais toujours à lui. Simple et blanc lui aussi. J’avais l’impression que son calme innocent cachait une cruauté sans nom. Et puis, j’ai dû en venir au fait. Malgré ma peur sans cesse grandissante, je devais m’allonger sur ce lit, et plonger dans un sommeil profond. Mais comment ce lit si simple pouvait vaincre Alice ? Pourquoi n’était-ce pas la grosse machine que l’imaginais ? Putain de bordel de merde, que foutait cette merde de lit ici ? J’aurai aimé fondre en larmes. M’écrouler sur le sol et ramper vers la porte. M’enfuir. Que pouvait ce lit pour moi ? Rien, c’était évident. Et pourtant, je suis restée devant lui, sans rien faire. Sans pleurer, sans tomber et sans ramper. La porte, je ne la voyais même pas. Juste ce lit, effrayant par sa simplicité.
Je m’y suis allongée. Avais-je le choix ? Lentement, mon corps entier s’étendit sur le matelas. Et puis, je me sentis très bien. Oui, c’est cela. Je baignais dans une atmosphère de béatitude enivrante. C’était bien, dans cette pièce blanche. Je n’ai plus rien vu, pas même mon ombre, ni même les murs. J’ai juste entendu un de mes soupirs. Et je suis morte. Morte de manière artificielle et souple. Ecrasée par un poids inconnu. Noyée sous des vagues de larmes séchées et oubliées. Où allais-je ? Pour faire quoi ? Mon esprit s’était arrêté. Ma mémoire s’était arrêtée. Elle repartait, et retraçait ma vie. Mise à jour ? Non, certainement pas. Enregistrement des données. Suppression des virus. Messieurs, mesdames et mesdemoiselles, veuillez redémarrer le système, je vous prie. No signal.

C’était une époque que je ne connaissais pas. C’était des couleurs que je ne voyais pas, et des odeurs que je ne sentais pas. Comme d’habitude, j’avais les yeux clos. Comme d’habitude, j’ai fini par entendre un soupir, le mien. Mon tout dernier soupir. Et puis, comme d’habitude, j’ai ouvert les yeux. Et, comme d’habitude, s’est offert à moi un champ merveilleux de lys blanc. Pourquoi restais-je là. Je ne partais pas en courant, alors que je le voulais tant. Pourquoi ne fuyais-je pas ce champ inconnu ? Qu’importe, finalement. Je ne pouvais pas fuir ma propre mémoire. Ah, retour à la réalité. Arrêter ici. Se réveiller pour éviter le pire. Maintenant, c’était maintenant que je devais le faire. Sinon, il serait-trop tard et je ne pourrai jamais me redresser avant… avant que ma douleur ne m’achève. Mais non. Rien. Pourquoi sombrer dans un sommeil profond ? J’en étais encore au stade des questions sur moi-même et sur ma présence dans cette pièce. Ainsi, je n’étais donc pas tout à fait endormie. Et je flottais entre Ema et Ema. Ema qui se battait et Ema qui sombrait. Ema qui sombre encore et toujours. Elle m’a eue.

Je suis de nouveau tombée dans un profond sommeil. Je commençais à mourir de chaud, et mon front perlait de sueur. Mais les lys dansaient toujours devant mes yeux clos. Je savais que je ne pouvais pas me réveiller et je finis par me prouver à moi-même que tout irait bien. Une goutte de moi-même écrasa le sol. Je discernais, au loin, une forme incertaine. Un monstre ? Une bête ? Alice. Je sais parfaitement ce que c’est. Mais je l’oublie, et je tremble de peur à chaque cauchemar. Je cherche à m’enfuir, coincée dans un dédale de fleur devenues rouges. Et les gouttes de mon corps ne cessent de rouler sur mes joues, sur ma robe. Pourquoi suis-je aussi ridicule, enfermée entre les pétales des fleurs ? Alice tourne autours de moi, et répète toujours les mêmes phrases. Le jardinier se joint à elle, et ils récitent ces mots que j’oublie, encore et toujours. Je pleure en silence, et je les regarde danser. Dans le ciel, des oiseaux hurlent mon nom de leurs voix éraillées, et me rappellent à quelle point je leur ressemble.

J’ai honte de rêver sans cesse de ça. Je suis tellement ridicule, dans ce rêve. Et à un moment donné, après quelques temps, le jardinier, Alice, les fleurs et les oiseaux disparaissent, et me forcent à me réveiller. Une fois encore, tout c’est passé comme ça. Finalement, rien n’avait changé. J’ai ouvert les yeux, et ai fixé le plafond quelque secondes, avant de descendre du lit. Il me semblait être moins seule. La chambre me semblait bien moins vide. Et je sentais un souffle sur mon cou.
J’ai eu très peur, mais n’ai pas crié. J’ai revu Alice, face à moi. Elle semblait rire, ou du moins sourire. J’ai cru qu’elle allait me parler, me dire quelque chose, n’importe quoi. Mais rien. J’ai tenté de m’approcher. Tenté de la toucher. Je n’ai fait qu’effleurer le mur. Alice est partie. Un sourire étira mes lèvres. A la prochaine séance, nous nous parlerons à nouveau. Je suis heureuse de voir que tu es encore là, Alice.

J’ai refermé la porte derrière moi. Il me semblait avoir perdu une partie de mon esprit, j’avais la désagréable impression d’avoir perdu mon intestin et mes muscles. J’ai marché en chancelant jusqu’à l’extérieur du pensionnat. Je ne souriais pas. Je n’étais pas bien, évidemment. J’ai vomi de manière lamentable, appuyée à un arbre. Et me suis écroulée comme une masse dans l’herbe. Finalement, j’allais sombrer encore un peu. Tenter de tomber au plus bas. Pour pouvoir remonter plus facilement.

Et retomber un peu plus tard.


[bouh, caca]
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